L'écrit scientifique en langues romanes
Dans les sources arabes nommées Abū-l-Qāsim Jalaf ibn ‘Abbās al-Zahrāwī (c. 936-c.1013), Abulcasis (ou Aboulcassis) était un médecin réputé, chirurgien et pharmacien de la Cordoue du califat omeya. Il serait devenu médecin à la cour du calife al-Hakam II et aurait été à la tête d’une école de médecine. Il est l’auteur du traité Kitāb al-tasrīf li man ‘aŷiza an al-ta ‘līf (Livre de la méthode médicale pour ceux qui ne sont pas capables l'avoir par eux mêmes), connu aussi sous les titres Kitāb al-tasrīf et Tasrīf, dont l’importance et l’impact ont traversé les frontières.
L’ouvrage, à caractère encyclopédique, fut écrit en arabe et finalisé vers l’an 1000. Ce recueil de médecine est articulé en 30 maqalas qui contiennent des connaissances théorico-pratiques de la science médicale, la pharmaceutique et la chirurgie. Les nombreux manuscrits connus de ce livre témoignent de sa répercussion et montrent qu’il a été utilisé jusqu’au XVIe siècle.
Mais sa diffusion ne s’est pas limitée au territoire musulman, il a été largement diffusé de l’Orient à l’Occident grâce aux traductions en hébreu, en latin et en langues romanes. Ainsi, les traductions du livre d’Abulcasis furent utilisées comme manuel pour l’étude de la chirurgie dans les principales écoles de médecine d’Europe durant la période médiévale, telles que Salerne ou Montpellier (Arvide Cambra 2003 : 11-13).
La partie la plus appréciée dans l’Occident chrétien était celle consacrée à la science chirurgicale, diffusée de façon indépendante. Il y a une traduction en latin du chapitre 30 faite par Gérard de Crémone (c.1114-c.1187) au XIIe siècle, à partir de laquelle ont été élaborées d’autres traductions en langue française (le Traitier de Cyrurgie, Trotter 2005) et en langue occitane. Le texte français a été conservé dans un manuscrit qui se trouve à la Bibliothèque Nationale de France (fr. 1318).
Le texte occitan est conservé dans un manuscrit de la bibliothèque interuniversitaire de Montpellier (H 95). Les manuscrits français et occitan présentent (en suivant la tradition illustrative de l’œuvre d’Aboulcassis) de nombreuses miniatures qui illustrent des instruments chirurgicaux et médicaux.
Du point de vue linguistique, les traités en langues vernaculaires (établis à partir de la traduction latine) présentent un certain nombre d’arabismes, surtout en ce qui concerne le vocabulaire technique et scientifique. Cela dit "les mots techniques d’origine arabe survivaient artificiellement dans le petit monde des scientifiques, sans vraiment influer sur la langue de tous les jours" (Trotter 2005 : 10).
Le manuscrit français (BNF, fr. 1318) peut être considéré "du point de vue lexical" comme un "témoin d’un français régional, en l’occurrence du français de la Lorraine, au XIIIe siècle" (Trotter 2005 : 9). Par ailleurs, il présente un pourcentage important de lexique en langue vulgaire qui montre « qu’il existait un lexique vernaculaire pour certains éléments de la langue scientifique" (2005 : 10).
La traduction occitane a été faite au XIVe siècle et fut étudiée par Tourtoulon (qui édita par ailleurs quelques extraits de l’ouvrage) au XIXe siècle (Tourtoulon 1870).
CAPITOL XIIII :
DE CAUTERIZACIO DE FETOR DE NAS.
CAPITOL LXVI :
La Chirurgie d’Albucasis, texte occitan du XIVe siècle, édition préparée par Jean Grimaud, révisée par Robert Lafont, Centre d’Études occitanes, Montpellier, 1985.
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